Comportement des fluides dans l'évolution magmatique puis hydrothermale du granite à Ta, Nb, Li de Beauvoir, d'après la géochimie isotopique de l'oxygène et de l'hydrogène.

Fluids behaviour in magmatic and hydrothermal evolution of Ta, Nb, Li, bearing albitic granite of Beauvoir (France) constrained by D and O isotope geochemistry.
Auteurs: 
A.M. Fouillac, A. Kosakevitch, T. Merceron, A. Meunier, P. Rossi
Année: 
1987
Numéro revue: 
2
Numéro article: 
28

La coupole granitique à albite-lépidolite de Beauvoir minéralisée en Ta, Nb, Li, Be a été recoupée par un sondage carotté sur un intervalle de 700 m sur le site d'Échassières. Trois types de granite ont été définis à partir des données pétrographiques et géochimiques : le granite B 1 entre 100 et 500 m, le granite B 2 entre 500 et 750 m et le granite B 3 entre 750 et 790 m.

Les analyses isotopiques de l'oxygène et de l'hydrogène ont été faites sur des échantillons de subsurface du granite apical (B 1 et B 2). Ces granites de subsurface présentent un domaine de variation étendu pour les δ18O roche totale (de 4,6 à 8,6 0/00 par rapport au SMOW) et les δD des micas (de -105 à -55 0/00 par rapport au SMOW). Les analyses 18O/16O réalisées sur les roches totales et les minéraux séparés des échantillons de granites du sondage montrent une évolution de la base au sommet corrélée avec le type de granite. Dans le granite B 3 les valeurs observées pour les minéraux sont celles de leucogranites normaux (δ18O quartz ~ 11,6 et δ18O mica blanc ~ 9,3 0I00) et correspondent à une température isotopique de l'ordre de 550 °C. Les δ18O obtenus sur le granite B 1 sont nettement plus bas que ceux du granite B 3 et anormalement bas pour un granite : δ18O quartz = 5,3 et δ18O mica blanc = 4,5. Les valeurs du granite B 2 sont intermédiaires entre celles du granite B 1 et celles du granite B 3. Ces résultats indiquent une interaction avec un fluide externe, d'origine météorique, à un stade magmatique, dans la partie supérieure de la coupole. Le caractère précoce de l'interaction est argumenté par les caractéristiques magmatiques des échantillons, par les fractionnements quartz-muscovite correspondant à des températures de l'ordre de 580 ± 50°C, par les pourcentages en poids d'eau très faibles des roches (de l'ordre de 0,3 0I00). Ces résultats et la corrélation existant entre la teneur croissante en tantale et l'appauvrissement en δ18O des granites conduisent à l'hypothèse métallogénique suivante : la présence d'eau d'origine météorique, ayant préalablement échangée avec les roches encaissantes induit une variation des conditions physicochimiques du système magmatique lors de sa mise en place qui favorise la concentration des éléments rares dans les phases qui cristallisent. L'introduction des eaux d'origine météorique dans le système magmatique se fait lors d'une fracturation hydraulique intervenant durant la transition liquidus-solidus du faciès B 1.

Les δD H2O calculés à partir des δD des lépidolites magmatiques du sondage, des lépidolites de certains des échantillons des sondages miniers courts et des muscovites en altération diffuse sont semblables (-60 < δD H2O ≤ -80 0I00) : le fluide magmatique et le fluide d'origine météorique ont des domaines de variation identiques en hydrogène.

Deux échantillons de sondages miniers situés près du granite des Colettes se distinguent des autres échantillons étudiés par une muscovitisation importante, par des δ18O non appauvris et un δD muscovite plus riche (-55 0/00). Ils ont probablement échangé avec une eau externe au granite de Beauvoir et ayant largement échangé avec le granite des Colettes.

Les minéraux néoformés en altération diffuse dans la roche ou en veine sont déposés entre 400 et 200°C par le fluide d'origine météorique plus ou moins mélangé avec le fluide magmatique et/ou échangé avec les roches encaissantes.

Un modèle de mise en place et d'évolution du système magma-fluide est proposé.

 

Mots clés: Isotope, Isotope stable, O18-O16, D-H, Granite (Granite Beauvoir), Lépidolite, Tantale, Phase fluide, Altération hydrothermale, Mise en place, Allier (Échassières).

The Beauvoir albite-topaz-lepidolite granite cupola has been intersected through an interval of 700 m in a cored borehole at Échassières. This is a late-Hercynian « rare metals » hololeucocatic granite, bearing Ta-Nb-Li-Be mineralization. It intrudes micaschists that are encountered in the borehole at the roof down to 100 m and then again at 800 m, at the bottom of the hole, in the floor of the southerly inclined slab of granite. Three types of granite have been defined on the basis of petrographic and geochemical studies, B1 (100-500 m), B2 (500-750 m) and B3 (750-790 m).

Values of δ18O and δD obtained on the apical variety of the granite (B 1 and B 2) showed that the sub-surface granites has very dispersed values; 4.6 < δ18O < 8.6 on W.R and -105 < δD mica< -55. Measurements were carried out on rocks unaffected by the low temperature alteration, and an evolution in the values for separated minerals can.be seen from the base upwards. In granite B 3 the values are normal for leucogranites : δ18O qz = 11.6 δ18O mica = 9.3 isotopic T0 = 550 °C, while in granite B1 they are: δ18O qz = 5.3, δ18O mica = 4.5. The values for granite B 2 are intermediate between those of B 1 and B 2.

These results indicate an early interaction of the granite with external fluids from magmatic to submagmatic stage, localised in the upper part of the cupola. The early timing of this interaction is supported by the magmatic characteristics of the samples, by the quartz-muscovite fractionation, indicating temperatures on the order of 580° ± 50 °C and by the low weight percentages of water of the whole rock (on the order of 0.03 %). These results, and the inverse correlation that exists between tantalum and δ18O values in the granites suggest the following metallogenetic hypothesis : the presence of meteoric water, in which exchanges have previously occurred with the surrounding rock, leads to variations in the physico-chemical conditions of the magma-magmatic fluid system and favours the concentration of rare elements in the crystallizing later phases. The introduction of meteoric water into the magmatic system is made possible by hydraulic fracturing that occurs during the liquidus-solidus transition in facies B 1.

The values of δD H2O calculated from the δD values of the lepidolites of the core-samples of magmatic rock from the drillhole, of the lepidolites of certain core-samples of apical granitic rock and of the pervasive newly crystallized muscovite are all similar (-60 % < δD H20 < -80 %), indicating that the magmatic and meteoric fluids have identical isotopic ranges of variation in hydrogen.

Two core-samples of apical granitic rock from close to the Colettes granite are distinguished by extensive muscovitisation, by lack of impoverishment in δ18O and a higher δD for muscovite (-55 %). These samples have probably undergone exchange with water external to the Beauvoir granite that has itself undergone exchanges with the Colettes hot granite.

The newly crystallised pervasive and vein minerals were deposited between 400° and 200°C by the meteoric fluid, that has been mixed to varying degrees with the magmatic fluid and/or undergone exchange with the host-rock.

A model is proposed for the emplacement and evolution of the magma-magmatic fluid system, pointing especially on the introduction of meteoric water as early as during liquidus-solidus course of cristallisation, in the upper part of the granitic slab.

Dernière mise à jour le 25.01.2019