La controverse sur l’âge des Sables bleutés du Haut-Var qui perdure depuis 1966 vient de rebondir à la suite d’une publication récente (J. Philip et al., 2017) développant un argumentaire en faveur d’un âge éocène inférieur pour cette formation et contre les tenants d’un âge oligocène inférieur. Or, si dans la plupart des petits fossés du Haut-Var, les Sables bleutés renferment des faunes et des microfaunes Éocène inférieur et Oligocène inférieur, mélangées en proportions variées, il faut admettre en stratigraphie, le principe universel de l’attribution d’un âge le plus récent pour la formation concernée. C’est d’autant plus vrai pour le fossé de Montmeyan, qui fait l’objet de la présente note et dont les arguments en faveur d’un âge oligocène avaient été brièvement publiés en 1972 à partir du contenu en Nannoplancton, puis longuement développés par F. Touraine dans sa dernière publication (Touraine, 1978). Il y faisait part de la découverte dans un niveau argileux gris au-dessus des calcaires à Bythinies et à la base des sables bleutés de la coupe de Saint-Maime d’une microflore comprenant une trentaine de formes polliniques dont le marqueur du Rupélien B. hohli et d’un facies laguno-marin, sans citer la présence de dinoflagellés. Ce niveau argileux gris, prélevé en 1972 par F. Touraine en compagnie de D. Nury et contenant du nannoplancton rupélien a été envoyé au BRGM en 1977 pour analyse palynologique.
Nous avons retrouvé les lames des extractions palynologiques datant de cette époque dans les collections du BRGM et avons repris l’étude complète de celles-ci à la lumière des chartes modernes de répartition des formes de spores, pollen et dinokystes publiées depuis 1977. Les résultats confirment et confortent les diagnoses réalisées à l’époque, tout en les complétant. Les grains de pollen sont abondants et variés. Une soixantaine de formes ont été inventoriées (voir liste ci-dessous), toutes présentes dans le Rupélien des bassins ouest-européens. Les marqueurs du Rupélien, tels Boehlensipollis hohli et Carya simplex sont représentés en grand nombre. Quatre grains de pollen seulement, sur 150 formes comptées, sont remaniés de formations antérieures avec des âges allant du Jurassique à l’Éocène. Les kystes de dinoflagellés, moins nombreux, témoignent d’un environnement de dépôt nettement marin et confirment l’âge oligocène de ce niveau avec la présence de Enneadocysta arcuata, Phthanoperidinium amoenum, Dapsilidinium simplex et Lejeunecysta spatiosa. La base des Sables bleutés de la coupe de Saint-Maime dans le fossé de Montmeyan est donc indéniablement d’âge rupélien inférieur.
Nous avons tenté de retrouver au Sud de Quinson, sur la rive gauche du Verdon la coupe de Saint-Maime levée et échantillonnée en 1972 par F. Touraine en compagnie de l’une d’entre nous (D. Nury) et publiée en 1978 par F. Touraine, coupe d’où est issu le niveau analysé par le BRGM. Malheureusement, à l’heure actuelle, la coupe ne présente plus que la partie inférieure de la section, depuis les argiles à oeufs d’oiseaux jusqu’au sommet des calcaires à Bithynies et les Sables bleutés n’affleurent plus dans ce secteur.
Il nous semble important de publier ces résultats, qui sont en contradiction, du moins pour le fossé de Montmeyan, avec les conclusions de J. Philip et al. (2017) afin que le débat reste ouvert et que des preuves irréfutables viennent expliquer la présence, dans ces Sables bleutés, d’Éocène sur certains bassins et d’Oligocène sur d’autres. Une recherche plus poussée sur la géodynamique de mise en place et de fonctionnement de ces petits bassins du Haut-Var pourrait peut-être fournir la clé de ce diachronisme.
Mots-clés : Palynologie, dinoflagellés, Sables bleutés, biostratigraphie, évolution géodynamique, Haut-Var, Provence.
The debate about the age of the “Sables bleutés du Haut Var” (Early Eocene versus Early Oligocene) which is lasting since 1966, find a new development with a paper (Philip et al., 2017) favouring an Early Eocene age for this Formation and developing arguments turned against scientists in favour of an Oligocene age. But, as F. Touraine demonstrated (Touraine, 1976), considering that mixed fossils and microfossils from both Early Eocene and Early Oligocene have been found in these Haut-Var troughs, it is admitted by the biostratigraphers community that the ages of youngest fossils prevail against the oldest. It is the case for the Montmeyan trough as exposed in the last publication of F. Touraine (1978) and where a lot of Early Oligocene (Rupelian) pollen grains and dinocysts have been recorded and reported in the present paper. In 1972, a sample was picked by F. Touraine and D. Nury from a grey clayed layer interbedded at the base of the “Sables bleutés” of the Saint-Maime section. This sample contained Nannoplancton interpreted as Oligocene (Nury and Touraine, 1972). The same sample was sent in 1977 to the BRGM to investigate the palynological content and analysed by one author (J.-J. Châteauneuf), who evidenced the occurrence of Boehlensipollis hohli and marine Dinocysts. In 2018, the palynological slide has been recovered from the BRGM collections and reviewed, throwing a new light on diagnoses owing to modern biostratigraphy charts published since 1978. The results confirm and enhance the conclusions given in the 70’s. At least sixty forms similar to those recorded from the main European Oligocene basins have been listed thus confirming the Rupelian age. The key species such as Boehlensipollis hohli and Carya simplex are abundant. Only four pollen grains (over 150) are reworked from older “terrains” (Jurassic to Eocene). The Dinocysts are less numerous but confirm a marine environment for the deposits and an Oligocene age. Among them, Enneadocysta arcuata, Phthanoperidinium amoenum, Dapsilidinium simplex and Lejeunecysta spatiosa are the most representative species. Thus, in the Saint-Maime section located to the North of the Montmeyan trough, the base of the poorly fossiliferous “Sables bleutés”, is clearly of Early Rupelian age and as a consequence is incompatible with the conclusions published by J. Philip et al. (2017).
We have tried to locate in the south of Quinson, on the Verdon left riverside a section very similar to the one investigated in 1972 and published in 1978 (Touraine, 1978). Unfortunetely, if the bird eggshells marls and the Bithynia limestones are well outcropping, the “Sables bleutés” facies are no longer visible in that area. As an alternative, samples where picked from gypsum marls and Bithynia limestones collected on the Saint-Maime section in order to find microfossils. But the results of analyses were negative.
These results show that the debate on the age of the “Sables bleutés” from the northern Var troughs is not closed and need to be reactivated in order to find a clear and final explanation to the age contradictory “points of view”.
Keywords: Palynology, Dinocysts, Sables bleutés, biostratigraphy, geodynamic evolution, Haut-Var, Provence
ERRATUM
Il est mentionné page 7 (paragraphe 5 dans les discussions) du présent article :
« ... la collection des gastéropodes que F. Touraine avait confiée à D. Nury et qui devait être examinée au Musée d’Aix-en-Provence par des spécialistes du Muséum de Paris, a été retirée du laboratoire de Marseille."
Ce texte doit être remplacé par le texte suivant :
Cette révision est toujours possible, en particulier sur la collection de F. Touraine qui se trouve sur le site Saint-Charles d'Aix–Marseille université.
Elle a été regroupée dans les mêmes lieux avec les autres collections de paléontologie de l’université dont la conservation est assurée par du personnel du CEREGE.
La collection est accessible sur rendez-vous.
L’inventaire de la Collection Touraine a été effectué entre 2012 et 2014. Son rangement, son informatisation et sa mise en ligne sur le site web du CEREGE ont été réalisés en juin 2018, accompagné d’un rappel de l’œuvre de Touraine, sa liste de publications et les différents thèmes de sa collection.
Dernière mise à jour le 28.05.2019