Résumé
Depuis la fin de l'orogenèse varisque, il y a environ 300 Ma, le territoire couvrant le Nord-Est de la France, la Belgique, le Luxembourg et le Nord-Ouest de l'Allemagne a connu une succession de phases de dépôts en domaine de bassin peu profond (mer épicontinentale) et d'altérations météoriques, ces dernières oblitérant tout ou partie de l'enregistrement sédimentaire. Plus encore que dans les zones de bassin, il est toujours particulièrement difficile de reconstituer l'histoire géologique continentale sur le socle hercynien (et plus ancien) et ses bordures, en raison précisément de ces altérations et de l'érosion qui y ont prédominé. L'absence d'interface sédimentaire continu ne permet ainsi normalement pas de quantifier les déformations verticales ayant affecté ces zones. Aussi doit-on utiliser d'autres marqueurs géologiques, telles les paléosurfaces continentales. Pour modéliser la géométrie des paléosurfaces continentales, il est nécessaire de compiler, critiquer et valider tous les indices disponibles, voire dans certaines zones pauvres en information de retourner étudier sur le terrain les nouvelles coupes exposant des paléoaltérations, ou bien de les explorer à l'aide de sondages. Afin de disposer de calages temporels, permettant d'attribuer les indices d'altération à l'une ou l'autre des paléosurfaces considérées, il faut également mettre en oeuvre différentes méthodes de datation sur ces coupes et indices. Le travail présenté à cette conférence a consisté à : - synthétiser, critiquer, valider et illustrer les travaux anciens et récents menés sur les paléoaltérations et paléosurfaces ayant affecté le socle paléozoïque et les terrains méso-cénozoïques, plus particulièrement les épisodes du Crétacé inférieur et du Paléogène et dans une moindre mesure ceux du Permien à Jurassique inférieur et du Néogène ; - réaliser quelques études plus précises de certains profils d'altération et dater ceux-ci (fig. 1 et 2) à l'aide de différentes méthodes (biostratigraphie, paléomagnétisme, géochronologie) ; - à partir de l'ensemble de ces données, reconstituer au format numérique à l'échelle du 1/1 000 000 la géométrie actuelle des paléosurfaces continentales infracrétacée et éocène ; - discuter des processus géodynamiques ayant opéré pour induire ces paléoaltérations et façonner les paléosurfaces afférentes, notamment la tectonique globale qui seule (c'est-à-dire quel que soit le contexte climatique et eustatique) peut produire des mouvements verticaux de la lithosphère à grande longueur d'onde et exposer à l'altération continentale des domaines très importants, et à échelle plus locale les rejeux de structures antérieures, principalement varisques. Les limites de l'exercice tiennent essentiellement au manque d'outil et de méthodes pour reconstituer la géométrie initiale des paléosurfaces étudiées, c'est-à-dire produire des cartes de paléoaltitudes lors d'épisodes choisis. Des hypothèses peuvent être émises, mais, en l'absence de certitude, la suite du raisonnement n'est au mieux que spéculative. Ces hypothèses pourront néanmoins être testées à l'occasion de modélisations numériques de l'évolution des paysages sur le long terme. Enfin, outre les âges obtenus pour les paléoaltérations, le renouvellement des connaissances sur les paléosurfaces, et les apports concernant les mouvements verticaux de la lithosphère dans cette zone, les résultats acquis peuvent directement être appliqués en géoprospective ou pour reconstituer les paléocirculations hydrogéologiques en travaillant sur leurs bassins versants au sens large. Un exemple en est fourni sur la figure 3 pour le Crétacé inférieur, période où la zone concernée était très largement en domaine continental (Thiry et al., sous presse).
Mots-clés : Altération météorique, Mésozoïque, Cénozoïque, Paléoaltération, Paléosurface, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Département des Ardennes, Massif Ardennais
Abstract
Since the end of the Variscan orogeny, the area encompassing north-eastern France, Belgium, Luxembourg and north-western Germany experienced successive episodes of marine deposition and continental weathering, the latter occulting part or all of the sedimentary record. Even more than in the basin areas, reconstructing the evolution of that part of the basement which remained continental for most of the Mesozoic and the Cenozoic is particularly difficult, precisely because weathering and erosion prevailed there. The lack of continuous sedimentary interface usually does not allow quantifying the vertical deformations of these regions. Therefore other geological indicators must be used, such as the continental paleosurfaces. Modelling the geometry of the paleosurfaces implies to compile, review and validate all the available indications, to gather new field observations in poorly investigated areas and to carry out auger- or boreholes. To date, at least approximately, the weathering occurrences and to ascribe those to one or another paleosurface require the use of various dating methods. The work exposed during this conference consisted in: - synthesizing, criticizing, validating and illustrating the old and recent works devoted to the paleoweathering and paleosurfaces of the Paleozoic basement and the Meso-Cenozoic formations, more particularly the Early Cretaceous and Paleogene episodes and to a less extent those of the Permian to Liassic and of the Neogene; - achieving precise studies of some weathering profiles and dating them (fig. 1 and 2) by different methods (biostratigraphy, paleomagnetism, radiometric dating); - from all the data, reconstructing digitally and at 1/1 000 000 scale the present geometry of the Lower Cretaceous and Paleogene paleosurfaces; - discussing the geodynamic processes involved in the development of paleoweathering and the associated paleosurfaces : - especially the global tectonics which alone (i.e. whatever the climatic and eustatic context) is able to induce long-wave lithospheric vertical movements and expose considerable realms to weathering, - and to a local extent the reactivation of Variscan structures. Our results are mainly limited by the lack of tools and methods to reconstruct the initial geometries of the studied paleosurfaces, i.e. to perform paleoelevation maps for given times. Hypotheses may be expressed, but reasoning relying on uncertain assumptions is at best speculative. Nevertheless those hypotheses may be tested by performing numeric modelling of long-term landscape evolution. Finally, besides the ages obtained for paleoweathering features, the renewal of the knowledge about paleosurfaces, and the contributions concerning the lithospheric vertical movements in this area, our results can directly be applied for geoprospective studies or to reconstruct the hydrogeological paleocirculations by working on their catchments sensu lato. An example is shown on figure 3 for the Early Cretaceous, an episode during which the studied area was mainly continental (Thiry et al., in press).
Key words: Weathering, Mesozoic, Cenozoic, Paleoweathering, Paleosurfaces, Belgium, Luxembourg, Germany, Ardennes France, Ardennes
Dernière mise à jour le 30.06.2015