L'extension syn- à post-épaississement de la chaîne varisque en Europe occidentale : modalités et conséquences

Syn-to post-thickening extension in the Variscan Beit of Western Europe: Modes and structural consequences
Auteurs: 
J.P. Burg, J. Van den Driessche, J.P. Brun
Année: 
1994
Numéro revue: 
3
Numéro article: 
2

Résumé

Deux périodes extensives sont reconnues dans l'évolution finale de lu chaîne varisque d'Europe occidentale. Pour résumer et simplifier cette histoire, l'étirement est surtout parallèle à la chaîne du Viséen au Westphalien. Il devient ensuite moins organisé, mais il implique une plus grande quantité d'extension, pendant le Stéphano-Permien. Du Viséen au Westphalien, l'extension est diachronique et commence dans les zones axiales, peut-être les plus épaisses de l'orogène. Elle accompagne la fin de la convergence continentale et ajuste le jeu de zones décrochantes qui réutilisent éventuellement les chevauchements hérités de la collision dévonienne. Les zones décrochantes traduisent l'échappement latéral de blocs continentaux en front de l'orogène. L'enregistrement sédimentaire différencie de façon marquée les régions montagneuses, profondément érodées, et les avant-pays où de grands bassins fluvio-deltaïques témoignent d'une ambiance tectonique calme. Bien que la convergence continentale soit encore active, l'extension est dénotée par des bassins volcano-sédimentaires contemporains d'un volcanisme acide, souvent de type explosif. Le plutonisme abondant, dérivé de la fusion crustale et qui caractérise la chaîne hercynienne, est attribué au début de la relaxation thermique de la croûte épaissie. Cet épisode extensif n'implique pas un important amincissement de la croûte mais atténue les effets de l'épaississement pendant une tectonique intracontinentale dominée par l'échappement de blocs continentaux. Du Stéphanien supérieur à l'Autunien, l'extension, surtout transverse à la chaîne, traduit un effondrement foncièrement radial. Cependant, des variations complexes en direction et quantité d'étirement interviennent par endroit. L'enregistrement sédimentaire ne permet plus de discerner les régions montagneuses et les avant-pays. La forte activité tectonique et volcanique d'un environnement extensif partout dans la chaîne varisque, et en particulier dans sa branche sud, est marquée par les nombreux bassins dont les sédiments d'origine proximale proviennent des reliefs des failles bordières, des coulées volcaniques et des caldeiras. Les discordances entre le Stéphanien et le Permien inférieur dépendent des vitesses relatives de subsidence et de sédimentation ainsi que des variations locales de la direction d'extension. La chaîne varisque d'Europe occidentale enregistre alors un métamorphisme de basse pression et est affectée par des failles de détachement tandis que l'exhumation de la croûte ductile est amplifiée par la formation de dômes de granites et migmatites. L'extension stéphano-autunienne est induite par l'effondrement gravitaire, après la convergence continentale, de tout le domaine épaissi. Elle permet un amincissement rapide à la suite duquel la croûte retrouve une épaisseur normale d'équilibre isostatique. Deux explications sont possibles : le volume du domaine épaissi est devenu suffisant pour produire des forces de corps, verticales, supérieures aux forces compressives, horizontales, dues à la convergence ; la chaîne se répand alors latéralement vers les avant-pays. L'alternative, que nous préférons, implique un changement dans la cinématique des plaques au Stéphano-Permien ; la modification de la géodynamique globale a provoqué le déclin des forces horizontales le long des limites de l'orogène, permettant la croûte épaissie en cours de relaxation thermique de s'effondrer vers une bordure libre. Les variations de direction et quantité d'étirement de l'extension stéphano-autunienne sont accommodées par des failles de transfert d'échelle crustale. II s'agit de discontinuités majeures qui séparent des régions où l'extension est essentiellement transverse à la chaîne des zones adjacentes où l'extension fait un angle moins fort par rapport à la chaîne. Le Sillon Houiller et la faille Nord-Pyrénéenne en sont probablement les meilleurs exemples. Nous proposons que la lithosphère européenne a hérité de cet événement extensif les grandes failles qui seront encore actives pendant le Mésozoïque et le Cénozoïque. D'un point de vue géodynamtque, les directions d'extension tardi-hercyniennes sont cohérentes avec le mouvement relatif dextre connu pour cet époque entre Gondwana et Laurentia. Une réflexion théorique et quantitative basée sur des expériences analogiques nous permet de quantifier l'étirement dû aux détachements crustaux. En appliquant ces techniques semi-quantitatives à l'extension stéphano- permienne, celle qui a les effets les plus marqués sur la structure de la chaîne varisque, nous montrons qu'elle a notablement exagéré la flèche des grands chevauchements collisionels. Par exemple, la flèche pré-extension des nappes d'éclogites et granulites du Massif-central oriental est réduite de près de 200 km à environ 100 km, une différence qui souligne l'importance des processus extensifs dans les grands systèmes de nappes. En corollaire, la largeur originale de la chaîne était pour beaucoup plus étroite que celle observée sur les cartes géologiques actuelles. En particulier, le Massif central oriental a été nettement plus élargi que le Massif central occidental et la Bretagne meridionale. En ajoutant en base de croûte des coupes restaurées les quantités de matériel enlevées aux coupes corrigées de l'étirement tardi-orogénique, on s'aperçoit que l'extension syn- à post-épaississement est un mécanisme tectonique essentiel dans le transfert de croûte inférieure vers la croûte supérieure. Nous montrons donc que l'effondrement d'un orogène varie d'un segment à l'autre en âge et en direction. II n'est pas nécessairement sub-perpendiculaire à la chaîne ; il commence dès les derniers stades de la convergence en s'associant à une tectonique d'échappement de blocs continentaux. De grandes failles décrochantes créées pendant l'effondrement post-épaississement sont des failles de transfert qui accommodent des variations latérales de direction et d'intensité de l'extension.

Abstract

Two extension patterns are identified in the Western European Variscides. Late-Visean-Westphalian extension is nearly parallel to the belt and took place during escape tectonics controlled by still active compression forces. Late-Stephanian to Early-Permian extension implies complex changes in extension direction induced by the gravitational collapse of the entire chain after continental convergence. Variations in the direction and the finite amount of extension are accommodaled by crustal-scale transfer faults. A quantitative and theoretical analysis guided by real geological examples in the Southern Massif central permits some rules to be established for intepreting the extended orogen. Several 10 % of transverse extension are inferred in regions strongly affected by the later event, thus exaggerating the length of regional sections. We have removed this effect on synthetic sections accross the Iberian, Massif central and Bohemian segments of the Variscan belt. We show that the early displacement of collision-related thrusts was significantly less and therefore, mechanically more plausible than figures commonly proposed. We also argue that a large part of the lower orogenic crust was tectonically transferred to higher crustal levels during late-orogenic processes.

Dernière mise à jour le 04.08.2015